Black Dog : l'une des surprises de l'année ?
- Julien Del Percio
- il y a 1 jour
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Une vaste étendue sans rivage. Une terre écaillée, sèche, anthracite. Un climat dont on devine la lourdeur et l’aridité. Au milieu de ce territoire hostile, inféodé aux lois humaines, on aperçoit pourtant un autocar, progressant laborieusement à travers la poussière…Jusqu’à ce que sa trajectoire soit violemment coupée par l’irruption d’une horde de chiens. Une entrée en matière fracassante, qui nous plonge dans un étrange sentiment de sidération.
Située à la lisière du désert de Gobi, l’action de Black Dog se concentre sur Lang (Eddie Peng, magnétique), de retour dans sa ville natale après une longue peine de prison. Il y découvre un centre urbain sinistré, en proie à une infestation de chiens errants, causée par les abandons successifs des habitants qui ont déserté les lieux.

Prenant place en 2008, à l’aube des Jeux olympiques de Pékin, le film entend explorer le revers du triomphe national et questionner les limites d’une expansion socio-économique à deux vitesses. Autour de Lang va bientôt graviter un nuancier de personnages - un malfrat avide de vendetta, une jeune comédienne désabusée, un vieillard dévoué aux animaux - censé offrir un portrait multiple de la Chine rurale contemporaine. Sur ce point, le film pourrait paraître un brin convenu, dans la mesure où il revisite un filon thématique déjà largement exploré par d’autres cinéastes chinois, tels que Wang Bing ou Jia Zhang-Ke (qui assume d’ailleurs la filiation en tenant ici un petit rôle). Mais là où ceux-ci optent pour une approche contemplative, voire documentaire, le réalisateur Guan Hu propose un objet référencé et plus accessible, qui pioche avec une grande inventivité dans l’imaginaire du cinéma de genre.
Le personnage principal, violent et mutique, s’apparente à une revisite malicieuse du cow-boy solitaire si cher au western tandis que les paysages lunaires, les épaves industrielles et les immenses structures métalliques nourrissent une sidérante imagerie post-apocalyptique. Le film outrepasse ainsi la chronique sociale pour offrir quelque chose de presque mythologique, qui rend un hommage puissant et cinématographique aux laissés-pour-compte de la Chine contemporaine.
Réalisé par Guan Hu (Chine, 110 minutes), avec Eddie Peng, Tong Lya, Jia Zhang-Ke