top of page

Critique de Alien Romulus : le massacre de l'été ?

Qu’attendre d’un film Alien en 2024 ? Depuis la fin de la quadrilogie inaugurale en 1997 avec Alien : La Résurrection, la saga a enchaîné les faux-démarrages et les ratés, entre deux opus opportunistes d’Alien vs Predator et les préquelles ambitieuses mais bancales de Ridley Scott (Prometheus et Alien : Covenant). Pour Disney, les enjeux derrière Romulus sont clairs: raviver l’image du Xénomorphe et faire oublier ces égarements qui ont progressivement étiolé le prestige de la saga. Et quoi de mieux pour renouer avec le meilleur qu’un bon vieux retour aux sources, sans Predator, sans surenchère, sans philosophie de comptoir, mais avec une formule simple de survival, carrée et efficace, qui avait fait ses preuves en 1979.


Un aveu d’échec ? Peut-être. Il est clair que la modestie de l’approche de Romulus joue parfois contre lui. Malgré quelques petites surprises bienvenues, le film souffre d’une structure prévisible et d’un manque d’envergure thématique évident. Souvent, le long-métrage se contente de rejouer une partition un brin éculée - la naissance gore de l’Alien, la rivalité avec les androïdes de la Weyland-Yutani, le face-à-face final sous forme de quatrième acte. Toutefois, pas de quoi bouder sans plaisir tant le cinéaste Fede Álvarez fait feu de tout bois pour offrir un cauchemar vicieux, soigné et inventif.

Car ce qui frappe dès la première scène de Romulus, c’est bien cette étonnante impression de retrouvailles. La musique bien connue de Jerry Goldsmith, les bruitages texturés des machines, le caractère rétro futuriste de la technologie -  pour le coup bien loin de l’esthétique lisse de Prometheus. On se sent dans un film Alien. La photographie crépusculaire (Álvarez a embauché Galo Olivares, le chef opérateur du film Roma d’Alfonso Cuàron) ainsi que les effets spéciaux impeccables modernisent la charte visuelle et achèvent de redonner ses lettres de noblesse à la saga. On croit à cet univers, à ces décors. La laideur d’Alien vs Predator paraît très, très loin !


Mais l'argument majeur de ce nouvel opus, largement mis en avant lors de la promotion, c’est évidemment le retour de la peur. Après une première partie qui pose un climat oppressant avec une lenteur bienvenue, Romulus offre une succession de confrontations particulièrement agressives, qui jouent intelligemment avec des éléments jusque-là sous-exploités dans la saga. Jamais un film Alien n’avait été aussi inventif avec les facehuggers, jamais l’acide sulfurique n’avait paru si dangereux. De la même manière, le long-métrage transcende largement son climax avec une impressionnante poursuite en apesanteur qui conjugue tension et spectacle. On n’en dira pas plus mais Romulus remplit aisément son quota d’adrénaline et de suspense, sans pour autant sombrer dans la surenchère gore.

Mais les scènes horrifiques qui jalonnent le film ne seraient pas aussi prenantes si les personnages présentés n’étaient pas attachants. Le dévoilement du casting de Romulus avait pourtant suscité quelques commentaires sceptiques de la part des fans, qui voyaient d’un drôle d'œil cet équipage très jeune. Des craintes heureusement infondées, tant la distribution s’avère convaincante, notamment la fratrie composée de Cailee Spaeny et David Jonsson, qui amènent une vraie émotion au milieu du carnage.   


C’est sans doute dans cette troupe “teenage” que l’on retrouve davantage la touche d’Álvarez à l’écriture. Ses deux précédents films d’horreur - Evil Dead et Don’t Breathe - s’attachaient à décrire une jeunesse désespérée, prête à tout pour s’extraire de leur condition et accomplir leur rêve. C’est ce même principe qui motive nos personnages dans Romulus, coincés sur une planète industrielle sordide où le soleil est dissimulé derrière d’épais nuages de pollution. En ce sens, c’est là que le film dresse l’ultime pont vers le premier opus : nos héros ne sont ni des soldats surentrainés, ni d’orgueilleux scientifiques, mais bien des prolétaires de l’espace, broyés par une société ultra-capitaliste et déshumanisante qui les exploite comme du bétail. Une vision extrêmement pessimiste du futur, qui demeure étonnamment d’actualité et montre qu’Alien a encore bien des choses pertinentes à nous dire.



RÉALISÉ PAR :  FEDE ÁLVAREZ,

AVEC : CAILEE SPAENY, DAVID JONSSON, ISABEL MERCED

PAYS : ÉTATS-UNIS

DURÉE : 119 MINUTES


Komentáře


bottom of page