Ego et cinéphile
J’ai voulu dire ce que ça dit, cinématographiquement et dans tous les sens ». Leos Carax paraphrase Rimbaud pour parler de son nouveau film. Après Annette en 2021, le cinéaste revient au cinéma avec C’est pas moi. Enfin revenir ce n’est pas le mot. Présenté cette année à Cannes Premiere, conçu au départ comme un court-métrage pour une installation au Centre Pompidou, ce nouveau film, un moyen-métrage de 40 minutes, est un autoportrait, un exercice de style, comme un devoir d’école de cinéma réalisé par un auteur dont la créativité a déjà été confirmée.
Selon les dires de Leos Carax, les raccords qui composent le film lui sont venues lors d’une insomnie. Le lendemain matin, il les montait en musique comme un essai expérimental mélancolique et ironique, où il revisite sa filmographie, ses angoisses politiques, ses influences musicales et littéraires, entrecoupées de cartons de texte où il présente sa vision du cinéma. Il est fascinant de le voir aussi fasciné par Jean-Luc Godard, l'imitant comme un étudiant qui l’aurait découvert quelques semaines plus tôt.
Si certaine·s trouveront C’est pas moi égotique, il n’en est pas moins à l’image du réalisateur - celui qui lors de sa standing ovation au Festival de Cannes a allumé une cigarette dans la salle de projection. Il se fout si vous l’aimez, en tout cas, lui, il aime le cinéma. Telle est la meilleure manière de résumer cette explosion d’idées dégoupillées à la minute. C’est la boîte à souvenirs d’un artiste qui pourrait laisser ces images comme les dernières traces de sa vie. Il est certain que c’est un moyen-métrage qui mérite d'être visionné au cinéma, tout comme il est certain qu'il sera plus digeste pour les aficionados de Carax. Mais rien que pour la scène post-générique, c’est un objet d’art qui peut marquer à jamais la cinéphilie d’une personne. Et puis une marionnette qui danse sur du David Bowie c’est fort sympathique à regarder.
RÉALISÉ PAR : LEOS CARAX
AVEC : LEOS CARAX, DENIS LAVANT, NASTYA GOLUBEVA CARAX
PAYS : FRANCE
DURÉE: 42 MINUTES